Et si demain la guerre etait terminée?
Ne serait-ce pas une raison de se battre? Ne serait-ce pas
une raison de mourir?
Thomas " Neo " Anderson (Keanu Reeves)
a fait un choix critique en posant la question que Morpheus
(Laurence Fishburne) et Trinity (Carrie-anne Moss) avaient
posée avant lui. En décidant de chercher et
accepter la vérité . De libérer son
esprit de la Matrice.
Car tout commence par un choix
Dans le second chapitre de la trilogie MATRIX,
Neo apprend à mieux contrôler ses dons surnaturels,
alors même que Sion s’apprête à
tomber sous l’assaut de l’Armée des Machines.
D’ici quelques heures, 250 000 Sentinelles programmées
pour anéantir notre espèce envahiront la dernière
enclave humaine de la Terre.
Mais Morpheus galvanise les citoyens de Sion en leur rappelant
la Parole de l’Oracle : il est encore temps pour l’Élu
d’arrêter la guerre contre les Machines. Tous
les espoirs se reportent dès lors sur Neo…
qui cherche encore sa voie, hanté par d’obscures
et troublantes visions.
Comment anticiper les suites d’un choix
que nous ne comprenons pas ?
Forts de leur amour et de leurs convictions,
Neo et Trinity retournent dans la Matrice avec Morpheus
pour exercer leurs dons surnaturels et déchaîner
leur puissant arsenal contre les forces de la répression
de l’exploitation. Mais, à l’intérieur
de la Matrice, certains hauts personnages refusent l’artifice
du choix et les responsabilités qu’il entraîne.
Car le choix n’est qu’une illusion,
entre ceux qui disposent du pouvoir et ceux qui en sont
privés.
Pendant ce temps, des exilés dont l’Agent
Smith (Hugo Weaving), inexorablement liés à
Neo, choisissent de désobéir au système
qui demande son annihilation. Au nom de cette humanité
qu’il méprisait jadis, Smith détruira
tout ce qui fait obstacle à sa soif de revanche.
Que veulent tous les hommes de pouvoir ? Plus
de pouvoir.
Au long de sa périlleuse plongée
au sein de la Matrice et de sa propre destinée, Neo
sera confronté à une résistance croissante,
une vérité encore plus aveuglante, un choix
encore plus douloureux que tout ce qu’il avait jamais
imaginé.
Tu n’es pas venu ici pour faire un choix.
Tu l’as déjà fait. Tu es ici pour essayer
de comprendre pourquoi tu l’as fait.
Au confluent de l’amour et de la vérité,
de la connaissance et de la foi, de la raison et du but,
Neo va devoir suivre jusqu’au bout la voie où
il s’est engagé. " Et si je ne peux pas
? ", demande-t-il. " Et si j’échoue
? "
Alors Sion s’effondrera.
NOTES DE PRODUCTION
Matrix chapitre deux : "plus bas, toujours
plus bas vers le fond du terrier…"
"Derrière les plis du rideau de
codes de la Matrice, Neo sent la résence d’un
mystère."
En 1999, Larry et Andy Wachowski et le producteur
Joel Silver dévoilèrent un film visionnaire
dont la puissance d’impact égalait la richesse
et la densité narrative. Inspirés par l’animation
japonaise hyper-stylisée d’AKIRA ou GHOST IN
THE SHELL autant que par les interrogations croisées
de la philosophie, de la mythologie, de la religion et des
mathématiques, par les illustrations hyper-kinétiques
de l’auteur de comic-books Geof Darrow comme par les
œuvres de Lewis Carroll, William Gibson et Philip K.
Dick, les frères Wachowski conçurent avec
MATRIX une histoire épique sur l’aliénation
technologique, le libre-arbitre, le coût de l’ignorance
et le prix de la connaissance.
Les réalisateurs ne se contentèrent
pas d’éblouir le public avec d’audacieuses
innovations visuelles, imitées depuis dans d’innombrables
spots, vidéos musicales et longs métrages.
Ils créèrent un film d’action provocateur,
chargé d’interrogations sur l’essence
de la réalité et de l’identité,
sur les choix que nous faisons et les forces ou les faiblesses
qui nous y contraignent.
Les Wachowski avaient toujours envisage MATRIX
comme une trilogie, et le succès du premier film
permit aux scénaristes-réalisateurs d’explorer
plus avant la mythologie qu’ils avaient tout juste
commencé de dévoiler.
Ils conçurent les chapitres II et III
de cette saga : MATRIX RELOADED et THE MATRIX REVOLUTIONS,
comme un seul film, destiné à être présenté
en deux parties.
Le résultat est à tous égards
révolutionnaire. La trilogie a atteint une qualité
visuelle sans précédent. La technologie du
" Bullet Time ", mise au point sur MATRIX, et
le nouveau procédé Universal Capture de RELOADED
et REVOLUTIONS élargissent les limites du possible
et serviront longtemps de référence et de
modèle. Paradoxe : pour illustrer les horreurs dont
nous menace un excès de technologie, la trilogie
a accompli elle-même un pas de géant technologique…
Les films MATRIX pulvérisent aussi
toutes les limites du cinéma d’action. Ces
séquences, à la fois brutales et si gracieuses,
associent les éléments des meilleurs films
de kung-fu, les voltiges au filin, les figures du western
et les arts martiaux orientaux. Conformément aux
traditions cinématographiques de Hongkong, les vedettes
livrent elles-mêmes leurs combats. Cette méthode,
chère à John Woo et au chorégraphe/réalisateur
Yuen Wo Ping, permet de marier étroitement action
et narration. Les combats, loin d’être une simple
diversion, nourrissent et impulsent le récit. Ainsi
chaque minute de film offre-t-elle quelque chose de substantiel
au spectateur.
Un autre facteur contribue à la fascination
qu’exerce sur nous la saga. Alors que la plupart des
films cherchent à fournir des réponses au
public, MATRIX se présente comme une gigantesque
question ouverte. Des références, semées
comme autant de cailloux blancs, suscitent en nous une cascade
de réflexions. La mythologie croise la philosophie,
les nouvelles technologies, la psychologie, la littérature
(" Alice au Pays des Merveilles "), la théologie
(le christianisme fait bon ménage avec le gnosticisme,
le bouddhisme zen, le taoïsme), pour mieux stimuler
notre esprit et nous apprendre à considérer
une multiplicité de vérités. La force
de ces films ne tient pas tant à ce qu’ils
sont en mesure de nous dire, qu’à notre propre
capacité à accueillir et développer
leurs idées.
Les concepts philosophiques et technologiques
avancés par les Wachowski ont inspiré plusieurs
recueils d’essais (dont " The Philosophy of The
Matrix " de William Irwin, " Exploring The Matrix
: Visions of the Cyber Present " de Karen Haber et
" Taking The Red Pill : Science, Philosophy & Religion
in The Matrix " de Glenn Yeffeth) et d’innombrables
cours traitant des thèmes les plus divers, de la
philosophie à la SF en passant par la communication
informatique, la religion et la culture contemporaine. L’ampleur
de ces réflexions montre à quel point ce cinéma,
si provocant, a touché et stimulé la conscience
collective.
La glace est ton amie : une formation de base…
pas si basique
"On ne connaît vraiment quelqu'un
qu’après s’être battu contre lui."
Pour se préparer au premier MATRIX,
Keanu Reeves, Carrie-anne Moss, Laurence Fishburne et Hugo
Weaving avaient passé quatre mois de l’hiver
1997-98 avec le maître Yuen Wo Ping afin de s’initier
au kung-fu et aux cascades, complexes et sophistiquées,
du film.
L’expérience, inédite, s’avéra
des plus rudes pour ces acteurs occidentaux, régulièrement
doublés dans les scènes d’action. Motivés
par leur ténacité et leur désir de
concrétiser la vision des frères Wachowski,
les comédiens se surpassèrent et obtinrent
en peu de temps des résultats inespérés.
" Nous voulions tous atteindre à l’extraordinaire
", dit aujourd’hui Keanu Reeves.
Lorsque les mêmes acteurs reprirent,
en novembre 2000, leur entraînement sur MATRIX RELOADED
et THE MATRIX REVOLUTIONS, ils étaient, selon Wo
Ping, " en grande forme et prêts à répondre
à nos demandes. "
" J’ai cependant trouvé l’entraînement
trois fois plus dur que sur MATRIX ", avoue Reeves.
" Les éléments kung-fu et le travail
au filin sont nettement plus sophistiqués. Il y a,
en seul combat de RELOADED, plus de mouvements que dans
la totalité du premier film. "
Les séances d’entraînement se déroulèrent
à un rythme quotidien, dans un hangar de Santa Monica,
par un hiver froid et pluvieux. " Lorsque nous arrivions
le matin, il fallait d’abord évacuer la pluie
de la nuit ", se souvient Laurence Fishburne. Le nombre
de cascadeurs avait pratiquement triplé depuis MATRIX,
notamment en raison de la présence d’une douzaine
d’Agents Smith, et le vaste plateau de " motion
capture " (prises de vues pilotées par ordinateur)
était passablement encombré.
Keanu Reeves consacra au moins 7 heures par
jour à s’entraîner au kung-fu. À
l’époque de MATRIX, l’acteur sortait
d’une opération au cou qui réduisait
quelque peu sa mobilité et nécessitait moult
précautions. La chorégraphie de Wo Ping en
tint compte, privilégiant les combats à main
nue aux dépens des coups. Cette fois, l’acteur
se sentait prêt à tout…
Keanu Reeves :
" Mais plus j’en faisais, plus on m’en
demandait ! Quand je réussissais un truc, ils en
exigeaient trois, quatre, six ! On s’éclatait
tous, mais cela représentait quand même un
boulot astreignant et douloureux. J’ai souvent fini
mes journées dans une baignoire remplie de glaçons.
"
Wo Ping :
" Keanu est un perfectionniste maniaque, jamais satisfait.
J’ai fait de mon mieux pour répondre à
ses exigences. Dans MATRIX, Neo se battait d’une seule
main contre les Agents. Entre-temps, ceux-ci se sont perfectionnés,
et dans RELOADED, Neo doit se hisser à un niveau
supérieur. Partant de là, j’ai demandé
à Keanu quantité de mouvements d’une
grande difficulté, qu’il a exécutés
avec une parfaite élégance. "
Reeves s’entraîna neuf semaines avec une équipe
de douze cascadeurs pour un combat de 5 minutes incluant
pas moins de 500 mouvements. Un effort harassant, mais indispensable
pour atteindre le degré de technicité visé
par les frères Wachowski.
Keanu Reeves :
" Wo Ping, Larry et Andy veulent des combats aussi
palpitants que possible. Ils aiment le spectacle, le divertissement,
ils exploitent le contact physique, dans ses aspects positifs
comme dans ses aspects négatifs. Le feu vous réchauffe,
mais il peut aussi vous détruire – c'est le
genre de dualité que mettent en évidence leurs
scènes d’action. "
Joel Silver considère que Wo Ping a apporté
une contribution inestimable à la trilogie visionnaire
des Wachowski :
" Son style s’accorde parfaitement à la
philosophie et aux principes narratifs des deux frères.
Les combats, loin d’être de simples affrontements
physiques, illustrent l’évolution des personnages.
Dans MATRIX, Neo découvrait ainsi son potentiel lors
du combat dans le Dojo ; dans RELOADED, le défi du
" Burly Brawl " l’amène à
se surpasser d’un coup. "
Ces scènes euphorisantes procèdent d’une
étroite complicité entre chorégraphe,
réalisateurs et comédiens.
Wo Ping :
" Toutes les scènes de combat ont été
imaginées par les deux frères, et c’est
à partir de leurs idées que s’est élaboré
mon travail. Le " Burly Brawl " fut difficile,
du fait que Neo y affronte simultanément une centaine
d’Agents Smith. D’où la nécessité
pour Keanu d’apprendre une série d’enchaînements
très rapides et d’une grande complexité.
Une fois qu’il a été au point, j’ai
demandé à chacun des Smith d’observer
soigneusement les mouvements d’Hugo Weaving et de
les imiter au plus près. Ma chorégraphie était
basée sur le synchronisme absolu de tous les participants.
"
Le combat de la Maison de Thé (où Neo affronte
Seraph, le garde du corps de l’Oracle) demanda de
Reeves une solide maîtrise des arts martiaux.
Wo Ping :
" Neo et Seraph se situent au même niveau par
rapport à l’Oracle, ce qui implique des aptitudes
égales au combat. Or Collin Chow pratique les arts
martiaux depuis de nombreuses années. Comparé
à lui, Keanu fait figure de débutant, et j’ai
dû faire appel au meilleur de ses capacités
pour que le combat soit équilibré. Une fois
de plus, la persévérance de Keanu a payé,
et nous avons pu obtenir le résultat souhaité.
"
Au-delà du " Bullet Time "…
le cinéma virtuel
"Que veulent tous les hommes de pouvoir
? Plus de pouvoir."
La réalisation des effets visuels de
MATRIX RELOADED et THE MATRIX REVOLUTIONS débuta
en mars 2000 dans le département maison ESC, où
John Gaeta, superviseur des effets visuels de la trilogie
et lauréat de l’Oscar pour MATRIX, dirigea
la création de plus de 1000 effets visuels (contre
" seulement " 412 pour MATRIX).
La principale innovation, proprement révolutionnaire
de Gaeta sur MATRIX est connue aujourd’hui sous l’appellation
de " Bullet Time ". Inspirée de l’animation
japonaise, cette technique de prise de " vues virtuelles
" fut développée par Gaeta et les réalisateurs
de MATRIX pour décrire l’expérience
de Neo dans la Matrice et sa capacité à dominer
temporairement cette dernière. Durant ces moments
où l’esprit d’un homme s’affranchissait
de la Matrice, l’action était captée
par une batterie de 120 appareils photo Nikon, pilotés
par ordinateur. La séquence d’image résultante,
scannée puis combinée à un arrière-plan
numérique, pouvait alors être manipulée
à n’importe quelle vitesse sans perdre de sa
netteté.
Mais cette technique ne pouvait déjà plus
satisfaire aux exigences croissantes et toujours plus ambitieuses
des Wachowski. Ceux-ci voulaient maintenant voir Neo affronter
simultanément 100 Agents Smith et voler à
3000 kilomètres/heure au-dessus d’une mégalopole
dix fois grande comme New York. Gaeta devait aussi nous
donner à voir une sinueuse procession de 250 000
Sentinelles évoluant le long d’un immense tunnel,
une infernale poursuite automobile de 14 minutes corsée
par deux féroces combats d’arts martiaux, une
poursuite à moto (à contre-voie, bien sûr),
des personnages accomplissant des bonds insensés
entre des véhicules lancés à pleine
vitesse, un spectaculaire ballet de collisions, explosions
et destructions…
" La technologie Bullet Time originale
était dépassée ", avoue Gaeta.
" Il fallait faire évoluer le concept. "
Autrement dit, inventer pour les séquences d’action
visionnaires de ces deux chapitres une technologie inédite.
L’expérience était familière
à Gaeta et aux frères Wachowski, mais elle
prendrait ici une dimension particulière et représenterait
un pas de géant pour la photographie virtuelle.
Joel Silver explique l’enjeu :
" Ils ont décidé de créer des
images que personne ne pourrait copier. Cela demande beaucoup
de temps, beaucoup d’argent et un sacré talent.
Les résultats sont stupéfiants. Ces gars ne
se sont pas contentés de monter la barre, d’introduire
une nouvelle référence en matière d’action
ou de narration. Ils ont redéfini les limites du
" visuellement possible ", ils ont explosé
nos références. "
Pour Gaeta & Compagnie, il s’agissait prioritairement
de créer des répliques virtuelles, tridimensionnelles,
des protagonistes, capables d’accomplir des exploits
surhumains à un niveau de réalisme inédit.
L’équipe " motion capture " commença
par engranger un énorme matériau visuel avec
le concours des principaux interprètes, de l’équipe
de Yuen Wo Ping et des cascadeurs. Un plateau spécial
(le plus grand de cette catégorie à l’époque
du tournage) fut ainsi, pendant plus de quatre mois, le
théâtre d’une activité intense,
complémentaire de celle de l’équipe
principale. On y tourna, pour RELOADED, THE MATRIX REVOLUTIONS
et le jeu vidéo " Enter the Matrix " le
plus important métrage en " motion capture "
réalisé à ce jour sur un film et même
sur les plus sophistiqués des jeux.
Wo Ping :
" Cette formidable technologie nous a permis d’effectuer
quantité de mouvements parfaitement impossibles dans
la vie, de renforcer le dynamisme des combats, la puissance
et la beauté de la gestuelle. "
L’équipe Gaeta sculpta littéralement
les images de synthèse des personnages, retravaillant
les corps, les musculatures, les tenues. Autre innovation
majeure, elle dota ces mêmes personnages d’expressions
humaines d’une diversité et d’un réalisme
sans précédent grâce à un nouveau
procédé, qu’elle baptisa Universal Capture.
La première phase de ce processus consista
à braquer cinq puissantes caméras haute définition
Sony HDW 900 sur les visages de chaque acteur, afin de capter
en très gros plan leurs expressions, leurs émotions
et les plus petits détails de leur physionomie.
Partant de ces enregistrements en temps réel, l’équipe
Effets visuels extrapola certaines zones, certains détails,
des visages des comédiens pour les appliquer aux
personnages virtuels, engendrant ainsi les images de synthèse
" humaines " les plus réalistes à
ce jour.
Une fois le contenu principal de chaque séquence
capté et enrichi d’une multitude de "
couches " (décors virtuels, objets infographiques
divers ou ajouts virtuels tels que jets de sang, reflets,
sillages de balles, etc.), la photo virtuelle ouvrait des
horizons infinis en matière de composition et de
montage. Et l’équipe de saluer la naissance
du " cinéma virtuel " "…
Ce cinéma virtuel confère une puissance spectaculaire
au " Burly Brawl " qui voit Neo lutter contre
l’Agent Smith et ses 99 répliques en un mouvement
de caméra continu, qui encercle le groupe et passe
du super-ralenti au super-accéléré,
tandis que les agresseurs reviennent inlassablement à
la charge, changeant à tout instant de position,
accélérant ou ralentissant leurs coups…
La Poursuite sur l’Autoroute représente
un autre exploit inédit du cinéma virtuel,
avec la collision surréaliste de deux véhicules,
captée sous un angle parfaitement impossible en prise
de vues réelles.
John Gaeta :
" Notre douce folie destructrice nous a poussé
à transcender les lois physiques qui limitent ordinairement
le cinéma d’action. Il est beaucoup plus amusant
de détruire ainsi des choses de manière parfaitement
extravagante, que d’illustrer les dégâts
que le premier venu peut causer avec des articles de consommation
courante, achetés au supermarché du coin.
"
Des cascades et combats défiant l’imagination
"Tu m’as toujours dit d’éviter
l’autoroute. Tu disais que c’est suicidaire."
Audacieuses et novatrices, les cascades de
MATRIX RELOADED réussissent à transcender
celles de MATRIX. L’une des séquences les plus
étonnantes du film est une méga-poursuite
de 14 minutes sur une autoroute, avec des collisions en
chaîne, une lutte à mort à l’intérieur
d’une Cadillac, un combat de kung-fu sur le toit d’un
camion, et, last but not least, la course à moto
de Trinity, fonçant à contre-voie sur une
puissante Ducati. Il fallut sept semaines pour filmer cette
séquence le long d’une boucle de 2,5 kilomètres
construite spécialement pour le film à la
Base Navale d’Alameda.
Laurence Fishburne :
" La tension ne se relâche à aucun moment.
À peine les voitures s’engagent-elles sur l’autoroute
que les flics les prennent en chasse. Les jumeaux s’en
mêlent, flinguent à tout va, changent d’apparence,
les Agents se pointent, Trinity saute sur sa moto, se trompe
de voie, et Morpheus arrive sur le toit du camion, tel un
surfeur. De la pure folie ! "
La Poursuite exigea du chef cascadeur R. A.
Rondell un énorme effort de coordination :
" On passait des heures avec les frères, rien
qu’à discuter la vitesse : " Supposons
que l’ensemble des voitures roule en moyenne à
90 km/heure. Si les poursuivants déboulent à
130, comment le spectateur percevra-t-il la différence
? " Je sortais alors mes petites voitures et on s’essayait
à les positionner. "
Une " pré-visualisation " informatique
s’avéra indispensable pour mettre au point
cette séquence particulièrement complexe et
ses dizaines de cascades, filmées au milieu d’un
flot de voitures. Ce procédé consiste à
découper précisément la scène
en ordinateur, à y ajouter les mouvements d’appareil
virtuels et à animer l’ensemble en vue d’obtenir
une " maquette " détaillée du produit
final.
Bill Pope (Directeur de la photographie) :
" Cette Poursuite épique inclut des axes de
caméras totalement inédits. Les frères
Wachowski ont conçu les plans dont ils rêvaient,
les ont entrés dans l’ordinateur, en ont fait
la synthèse et nous ont chargés de concrétiser
le tout. "
Passant de la théorie à la pratique,
il fallut ensuite descendre sur le terrain…
R. A. Rondell :
" Nous avons arpenté l’autoroute…
avec un mètre pour préparer le trajet de la
Ducati de Trinity et de la moto-caméra qui la suivrait,
en signalant précisément les manœuvres
des engins. Nous avons aussi calculé les déplacements,
les distances de freinage, etc. Puis nous avons mis en place
les voitures.
" Cette planification minutieuse devait cependant rester
discrète, invisible. Une circulation par trop régulière
des véhicules aurait vite paru monotone et artificielle
au spectateur. Il fallait introduire de la vie, tout en
prenant en compte les objectifs et placements de caméras
ainsi que notre désir de filmer la scène sous
des angles inhabituels. Le challenge était de concrétiser
l’ensemble en temps réel – stade où
il faut prendre en considération le facteur humain.
"
Carrie-anne Moss :
" J’ai toujours eu une peur terrible des motos,
et il m’était pénible d’y monter
chaque matin pour mon entraînement. J’ai commencé
sur une toute petite moto. OK. Je suis passée à
une plus grosse. OK. Et j’ai continué comme
cela pendant des mois jusqu’à pouvoir chevaucher
la Ducati. Ma plus grande crainte ? Mourir ! "
Une crainte qu’on peut aisément partager. L’actrice
serait en effet aux commandes d’un puissant engin,
roulant à contre-voie face aux voitures, avec sur
le siège arrière l’acteur Randall Duk
Kim – et aucun des deux ne porterait de casque.
Les décors de MATRIX, chapitres II
et III
" Ils descendent un grand escalier courbe
qui longe l’arrière d’une grotte naturelle,
élargie par endroits. Un incroyable réseau
de tuyaux ruisselle littéralement à travers
le décor. Poursuivant leur descente, ils accèdent
à un large balcon métallique et atteignent
enfin le fond du terrier : Sion… "
MATRIX RELOADED et THE MATRIX REVOLUTIONS
ont été conçus par les frères
Wachowski comme une épopée cinématographique
d’un seul tenant, présentée en deux
parties. Conclusion de la trilogie MATRIX, ces deux chapitres
furent réalisés en 270 jours. La première
phase se déroula à Oakland (Californie), de
mars à juin 2001 ; la seconde, de septembre 2001
à août 2002, aux Studios Fox de Sydney, où
avait été réalisé le premier
MATRIX.
Sur le seul continent australien, ces deux films ont généré
plus de 3500 emplois, mobilisé 80 acteurs à
temps plein et plusieurs centaines de figurants.
Joel Silver :
" Ce fut une opération de très grande
envergure. Nous avions en permanence un millier de noms
sur la feuille de paye. "
L’un des premiers artistes recrutés pour la
trilogie fut le graphiste Geof Darrow, dont le délirant
comic-book " Hard Boiled " inspira les deux frères
dans la création de leur univers post-apocalyptique.
Darrow livra des dessins à la main, extraordinairement
fouillés, des décors et personnages mécaniques
: l’intérieur louche, baroque, très
" caverne d’Ali Baba " de Nabuchodonosor
; les différents robots qui ondulent, bondissent
ou volent à travers le " désert du réel
" ; les champs où sont cultivés les humains
; les sinistres tours de la Centrale où ils "
vivent ", confinés dans des nacelles…
Travaillant en étroite collaboration avec le chef
décorateur Owen Paterson et son équipe de
concepteurs et dessinateurs de story-boards, Darrow apporta
une contribution esthétique majeure à MATRIX
RELOADED et THE MATRIX REVOLUTIONS.
Pour matérialiser ces concepts, le service décoration
disposait à tout moment de plus de 400 collaborateurs,
placés sous la tutelle de Paterson. Alors que celui-ci
n’avait créé " que " trente
décors sur MATRIX, les deux chapitres suivants en
totaliseraient cent cinquante.
Owen Paterson :
" Cela représenta un énorme travail de
fabrication, d’autant que nous ne disposions que d’un
petit nombre de plateaux et que certains de ces décors
ne servaient pas plus de deux jours d’affilée.
D’où un gros effort d’organisation pour
Hugh Bateup, les directeurs artistiques et les constructeurs
: sitôt un décor assemblé et filmé,
il fallait le démanteler pour mettre en place en
suivant. "
La création du décor de l’autoroute
reflète à elle seule l’ampleur de ce
travail. Plutôt que de tourner cette séquence
de poursuite sur une voie existante, qu’il aurait
fallu boucler pendant sept semaines, la production choisit
de construire sa propre autoroute sur une piste de la Base
Navale d’Alameda.
Owen Paterson :
" Longue de 2,5 kilomètres, encadrée
de murs de 6 mètres de haut, sa construction fut
un énorme chantier. Pour les murs, le directeur artistique
Mark Mansbridge et le chef constructeur Butch West se firent
livrer des tonnes de rondins et de contreplaqué qu’ils
enduisirent de plâtre couleur ciment et d’un
revêtement hydrofuge avant de les assembler et de
les clouer. La seule construction de ces murs mobilisa une
centaine de travailleurs. "
Lorsque l’équipe quitta Alameda, le décor
fut démantelé et les rondins – encore
en excellent état – furent, à l’initiative
du régisseur d’extérieurs américain
Peter Novak, envoyés au Mexique où ils servirent
à la construction d’une centaine de maisons
pour des familles à revenus modestes. Une initiative
qui valut à Novak l’Humanitarian Award de la
Commission Cinéma de Californie.
C’est également à Alameda
que l’on construisit l’un des plus vastes décors
du film : le Temple de Sion, une grotte assez ample pour
accueillir 2000 figurants.
Owen Paterson :
" La ville de Sion est l’exact opposé
de l’univers high-tech de la Matrice. Située
près du centre de la Terre, elle évoque par
son look industriel les débuts du vingtième
siècle. Bien que décrépite et mal entretenue,
elle continue de fonctionner.
" Sion est une structure à plusieurs niveaux,
dont le plus élevé abrite un bassin pour aéroglisseurs.
Cette zone ressemble à une immense citerne surmontée
d’un dôme et traversée de longues plateformes
reliées par des passerelles. On y distingue aussi
des dépôts de munitions aux allures de bunker
et une série d’ascenseurs, le tout passablement
archaïque et rouillé.
" En descendant d’un étage, on débouche
sur la zone de commandement militaire d’où
l’on gagne les fondations de la ville. Celles-ci comprennent
elles-mêmes plusieurs niveaux. Le plus élevé,
que Larry, Andy et Geof appellent le Cerveau, abrite au
milieu d’un incroyable fouillis de tuyaux, conduits
et ventilateurs, la Chambre du Conseil. Un immense ascenseur,
dont le look évoque une chaîne d’ADN,
plonge dans les profondeurs de la ville, où s’entassent
250 000 habitants. Ceux-ci habitent de petits lotissements,
chaque niveau étant relié au suivant par une
passerelle. L’ensemble est de forme circulaire. Sa
banalité inhumaine fait écho à celle
du lotissement – rectangulaire et tout aussi anonyme
– où s’affrontent Neo et Smith.
L’équipe appliqua les mêmes
critères esthétiques au décor de l’Égout,
antique et décrépit à souhait.
Owen Paterson :
" C'est un immense boyau, plus que millénaire
et menacé de ruine. Mais il n’en illustre pas
moins la volonté de l’homme de vivre pleinement
sa vie et de garder espoir en l’avenir. "
Le service de Paterson dut fréquemment construire
deux ou trois versions du même décor à
divers stades de sa destruction. Plusieurs décors,
dont le château de Merovingian, furent conçus
pour des scènes d’action mouvementées,
riches en cascades et effets spéciaux : tirs, chutes,
collisions, nécessitant des mesures de sécurité
particulières.
Le service déco produisit aussi des centaines d’armes
en caoutchouc pour les nombreux combats du film.
Owen Paterson :
" Ces armes, moulées et peintes, ont des formes
compliquées. Il a fallu les fabriquer à la
chaîne parce qu’elles se cassaient régulièrement.
" Notre service a aussi construit une grande quantité
de Sentinelles mortes – les vivantes étant
du ressort du département Effets spéciaux
visuels. Les accessoiristes réalisèrent la
première Sentinelle à partir d’un modèle
informatique. Ce prototype physique fut ensuite moulé,
dupliqué et peint. On suivit le même processus
en ce qui concerne les armements individuels " APU
", que l’armée de Sion utilise contre
les Sentinelle. Tous les services ont œuvré
main dans la main, chacun a fait du bon boulot. "
FICHE ARTISTIQUE :
Keanu Reeves : Thomas A. Anderson/Neo
Laurence Fishburne : Morpheus
Carrie-anne Moss : Trinity
Hugo Weaving : L'agent Smith 2.0
Aaliyah : Zee
Matt McColm : L’Agent Thompson
Jada Pinkett : Niobi
Harry J. Lennix : Lock
Daniel Bernhardt : Agent Johnson
Monica Bellucci : Persephone
Nona Gaye Zee
Lambert Wilson : Merovingian
Clayton Watson L'enfant
FICHE TECHNIQUE :
Réalisateurs : Andy Wachowski et Larry
Wachowski
Réalisateur 2ème équipe : Yuen Woo
Ping
Scénaristes : Andy Wachowski et Larry Wachowski
Producteurs : Joel Silver et Grant Hill
Production & distribution : Warner Bros
Musique : Don Davis
Image : Bill Pope
Animation et effets visuels : John Gaeta
L'AVIS DE LA PRESSE :
CinéLive:
" Un déluge d’effets spéciaux,
des envolées philosophiques et un Keanu Reeves au
diapason font de ce film plus qu’un simple divertissement
: le manifeste d’une certaine modernité du
cinéma. "
Jean-Paul Chaillet (article entier disponible dans Cinélive
n°69, page 54)
Chronic’art :
" Beaucoup d’énergie et de simplicité,
et surtout une force dramatique amplifiée, font de
Matrix reloaded l’une des plus belles "demi-surprises"
de l’année. Pas si mal comparé aux blockbusters
traditionnels. "
Vincent Malausa (article entier disponible sur le site de
Chronic’art)
Télérama :
" Avec ce film, les frères Wachowski ont fait
la course en tête, renouvelant tout l’attirail
du cinéma de divertissement : récit plein
de chausse-trapes ludiques, fusillades au ralenti, cascades
en apesanteur, look futuriste-gothique... Qu’allaient-ils
aujourd’hui nous sortir de leur chapeau ? Aucun lapin,
hélas. La fantaisie du conte a disparu. "
Frédéric Strauss (article entier disponible
sur le site de Télérama)